Le bonheur au travail : tour d’horizon d’un enjeu essentiel
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Le bonheur au travail est un enjeu essentiel, mis en avant par de nombreuses études, dont celle-ci (lien pdf en anglais!) que nous résumerons ainsi : du côté employé, on travaille mieux (mais alors beaucoup mieux) avec le sourire, du côté patron, on gagne plus de sous (mais alors beaucoup plus) si les employés se plaisent au travail. Mais le bonheur, notion subjective, changeante, est difficile à quantifier. C’est cependant l’ambition d’une étude menée par l’Ipsos pour le compte de la société Edenred, géant peu connu à l’origine notamment des tickets restaurants. Depuis 2004, les sondeurs de l’Ipsos interrogent les salariés, de France dans les premières éditions, puis d’Europe, et enfin du monde depuis l’édition 2016 (lien pdf), sur leur bonheur au travail, pour faire ressortir des tendances et cibler les initiatives à suivre pour enfin siffler en travaillant. Bureau24 vous propose donc son petit décryptage des leçons à tirer de ce précieux rapport.
Un peu de méthodologie
Toute étude sérieuse se concentre avant tout sur la méthodologie. Pour mesurer le bonheur au travail, les sondeurs d’Ipsos ont dégagé trois dimensions clé du bien-être au boulot : le cadre de travail (équipement, clarté des tâches, soutien des collègues, équilibre entre vie privée et professionnelle), l’attention portée au salarié (se sentir considéré, avoir une hiérarchie sensible à ses compétences et sa formation) et enfin l’émotion dégagée (plaisir à venir au travail, intérêt pour ses tâches, environnement, confiance en son avenir interne).
L’étude mélange donc le subjectif et l’objectif, comme il se doit pour mesurer quelque chose d’aussi difficile à saisir que le bonheur. En lisant les résultats, il faut donc garder à l’esprit les biais culturels inhérents à ce type d’enquête.
L’Inde voit la vie en rose, le Japon broie du noir
L’étude concerne 14 000 salariés dans 15 pays. Le score moyen obtenu est élevé : 71% des sondés affichent des scores positifs. Au premier rang des gens super contents de se lever le matin pour aller bosser se trouvent les Indiens, avec 88% de réponses positives. Les Japonais ferment la marche, loin, très loin derrière tous les autres pays, avec 44% des personnes interrogées satisfaites de leur vie professionnelle.
Au dessus de la moyenne, on trouve un peloton d’économies en développement mené par l’Inde et qui comporte Mexique, Chili, et Brésil. Deux économies développées complètent le tableau des gens qui sifflent en travaillant : États-Unis et Allemagne.
En position centrale, on trouve un groupe divers : Royaume-Uni, Chine, Pologne et Belgique.
Doit-on voir une trace du pessimisme légendaire des Français en constatant que la nation tricolore se situe sous la moyenne ? Avec 67%, la France est en queue de peloton, mais pas de si loin. L’Espagne, l’Italie, la Turquie nous accompagnent, ainsi que le petit dernier, le Japon, qui soigne son exception culturelle en se classant loin de tout.
Un bonheur multiforme
L’étude détaille aussi ses résultats critère par critère. Ainsi les plus hauts scores sont obtenus pour ceux relevant du cadre de travail (86% de satisfaits concernant la clarté des tâches, 78% concernant le soutien des collègues, 77% concernant l’équipement). Les bas scores se concentrent sur l’émotion et l’attention, ce qui est quand même dommage, quand on considère que le facteur numéro 1 du bien-être au travail est la reconnaissance.
La France : pessimiste ?
Sous la moyenne, la France ne devance que la Turquie, l’Italie et le Japon. L’étude offre quelques pistes pour comprendre ce pessimisme ambiant.
Tout d’abord, malgré la flopée d’études qui confirment l’importance du bonheur au travail dans le succès économique de toute organisation visant à faire du fric, il semble que les entreprises françaises ne fassent que peu d’efforts : seul un Français sur deux considère que son entreprise met en place des politiques actives en matière de bien-être au travail. Amis patrons, réveillez-vous !
D’autre part, le salarié français se sent bien souvent déconsidéré : seuls 55% des sondés considèrent que leur hiérarchie se préoccupe de leurs compétences et de leur formation (contre une moyenne de 61% à l’international). Ajoutons à cela une joyeuse couche d’incertitude économique, avec un pays qui peine à se relever de la crise, un chômage répandu, qui font que les Français sont peu confiants quant à leur avenir professionnel. Reste un point qui lui ne connaît pas la crise : le très réjouissant (non?) mythe du déclin français : seuls 38% des sondés tricolores ont confiance dans l’avenir de leur pays (contre 54% de moyenne).
Autre chiffre qui donnera le sourire aux misanthropes qui haïssent leurs prochains et se nourrissent de leur insatisfaction chronique, mais qui ne fera pas plaisir à quiconque n’est pas concerné par cette définition hâtive, 56% des Français ne sont pas satisfaits de leur pouvoir d’achat. Quand on considère que le niveau de salaire est la préoccupation majeure de 47% des Français, on comprend un peu mieux nos scores faiblards.
Édition 2015 : la France sur le podium
Et même à la première place. Manque de bol, ce n’est pas du meilleur podium. L’édition 2015, réalisée uniquement en Europe, classe la France en tête pour ce qui est du… pessimisme. L’édition 2016 se situe dans la continuité des résultats des éditions précédentes, avec des préoccupations similaires (la France, numéro 1 des préoccupations salariales) et un pessimisme de fond qui s’épanouit joyeusement dans un contexte de chômage important, de précarité grandissante, d’instabilité professionnel, et où David Guetta sévit impuni (non sérieusement, vous avez déjà bossé dans un endroit qui joue la radio en fond sonore ? D’après un sondage réalisé par moi-même auprès de moi-même et de quelques-unes de mes personnalités imaginaires, David est la première source d’arrêt de travail en France).
Des pistes à suivre pour inverser la tendance
Chaque année, Edenred nous sert donc sur un plateau son étude complète pour faire ressortir les tendances sur le marché du travail. Mais l’étude ne se contente pas d’empiler les chiffres. Elle offre aussi des pistes à suivre pour que le bien-être au travail devienne une réalité.
L’édition 2016 conseille aux entreprises, d’après les tendances mondiales, de travailler sur le développement des compétences des employés, vue comme la politique qui impacte le plus le bien-être au travail. Autres points dignes d’intérêt, la gestion de carrière des salariés seniors, la flexibilité dans l’organisation du temps de travail et la promotion de la santé au travail.
Et puisque la France ne fait rien comme les autres, sinon ce serait quand même moins marrant, l’étude relève que le plus important pour les salariés tricolores tient dans la diversité et l’intégration des jeunes.
Reste une réalité, mise en évidence par de nombreuses études, et celle-ci ne fait pas exception. Dans les propres mots du DRH d’Edenred : « Dans des univers professionnels en profonde mutation, l’individu salarié occupe un rôle central. La prise en compte active de son bien-être au travail est une priorité L’engagement des salariés est au cœur de la performance durable des organisations. »
Le bonheur au travail est un enjeu à tous les niveaux. Le bien-être, ça n’a pas de prix. Et pour les patrons, celui de ses salariés peut rapporter gros. Et de votre côté, le bonheur au travail, qu’en pensez-vous ? Et surtout, devrait-on envoyer David Guetta répondre de ses crimes musicaux à la Haye ? N’hésitez pas à nous le faire savoir dans les commentaires !